les affaires internes du Monastère

"Te sens-tu menacé? Pour l'instant tu ne risques absolument rien...pour l'instant..."

Enora resta debout, au pas de la porte,

"Je vais te raconter une histoire. Avant devenir ce que je suis maintenant, je travaillais dans les champs avec mes parents et mon petit frère. Une vie à la compagne et j'étais heureuse jusqu'au jour où une bande d'elfes noirs est venue nous attaquer. Mon père m'avait caché dans le puits et quand je suis ressortie tout avait brûlé...tout. Il ne restait qu'un tas de cendres, je n'ai même pas pu enterrer mes parents et mon frère. Apeurée, rongée par le chagrin et la haine je ne savais pas où aller, quoi faire... Le hasard m'a emmené ici et les prêtres se sont occupés de moi. L'éducation que j'ai eu fut stricte mais utile. J'ai appris pour pouvoir semer la destruction de nos ennemis. La fille des champs est devenue une assassine."

Elle prit son épée et la pointa devant Braddar

"Tu sais te dissimuler, te faufiler, tuer sournoisement....rejoins l'ordre des assassins!!! Rejoins nous...qu'en dis-tu?"

"Cohérente...On s'trompe rarement sur nos candidats. Hannibal t'a envoyé ici juste parce que t'avais une bonne tête? Il a décelé un truc... un truc qui pourrait te convenir. En t'observant lors de ta première mission, j'ai bien vu que t'étais fait pour ça et qu'Hannibal ne s'était pas trompé. Enfin si, sur une chose : il n'a pas vu que tu es hargneux, arrogant et indiscipliné comme un enfant pourri gâté."

Elle se retourna, la main sur la porte prête à repartir,


"Termine les défis et tu connaîtras mon nom, ceux des autres et la vérité..."


Elle sortit et referma la porte de la chambre,

seule : "J'en ai trop dit, je vais avoir des problèmes..."

Cette femme l’intriguait. « Hargneux, arrogant et indiscipliné comme un enfant pourri gâté » ? Il sourit dans le noir. Elle ne manquait pas d’air ! Si vouloir savoir dans quoi il posait les pieds avant de les y mettre était sa définition de ces mots, alors c’est ce qu’il était. Il ne voyait pas en quoi c’était mal.

Elle voulait qu’il rejoigne la guilde d’assassins à la solde du culte ? Faire partie d’une équipe n’était pas pour lui déplaire si c’était pour pouvoir mieux la connaître. Elle l’intéressait. Il resta songeur un long moment. La nuit fit lentement place au jour.

Il prit sa décision. D’accord. Si pour avoir plus d’informations il devait repasser voir ce prêtre et accomplir une dernière quête, il la ferait.

Le soleil avait à peine émergé de l’horizon qu’il demandait audience au temple.

Juge de la situation ? Pour qui elle se prend là ? J’avais quel choix ? On est dans un champ dégagé et les chiens courent plus vite que moi. Si je cours, ils me rattrapent et me dézinguent. Si je fais front, j’ai une chance. Je ne vois pas où est le mauvais choix… Et ici ? Ah, d’accord. Ca me rappelle un peu ces courses qu’on faisait sur les toits, en devant éviter les tuiles brisées, les trous dans les faites et les mousses glissantes.

Il sauta lui aussi sur un poteau et se mit à se déplacer. C’était comme nager, ça revenait à une vitesse étonnante. Il traversa le chemin de poteaux avec agilité, moins vite qu’Enora mais honorablement quand même, et atteignit le bout du parcours sans autre encombre que la dernière réception où il trébucha.

« Je suis un peu rouillé, mais ça devrait quand même aller, me semble-t-il. Il lui sourit. Enfin, c’est toi l’entraîneur, c’est toi qui vois. »

"Je vois que tu vas recommencer" dit-elle en se regardant les ongles puis rajouta,

"Une simple chute, glissade, pourrait avoir des conséquences fâcheuses. Tu ne peux te satisfaire de ta prestation."

"Ton entrainement est terminé. J' irais demain faire mon rapport à mon maître puis je reviendrais te voir pour te faire part de sa décision. En attendant redescendons pour aller manger ton tétras et tu vas me parler un peu de ton ancienne guilde"

"Je suis arrivée ici très jeune, les prêtres se sont occupées de moi et je suis devenue une assassine de l'ordre. La haine que je porte aux Drows, mon maître m'a aidé à la contrôler. J'aide l'ordre et en même temps j'assouvie ma vengeance."

Elle regarda autour d'elle puis lui chuchota

"les prêtres sont entrain de préparer quelque chose mais je ne sais pas quoi. Lorsque tu rencontreras mon maître, essaye de savoir ce qu'il mijote."

A l'instant où Braddar posa sa main chaude sur la cuisse, Enora lui planta sa fourchette.
"Tu me prends pour qui? Une fille facile. Retires ta main et vas prendre une douche froide"

Enora lui répondit tout en le menaçant de sa fourchette.
"C'est pas parce que je t'aime bien que tu vas me tomber tout de suite sur le râble. On n'est pas des bêtes.
Au moins ce petit coup va t'emmener à réfléchir et non à suivre tes bas instincts."

Elle l' écouta et le regarda porter son toast.

"Tu deviens ridicule, vas te coucher. Je te veux en forme demain"....

"Il se fait tard, demain tu as un rendez-vous important. Ton esprit est affaibli par des images malsaines. Demande à la serveuse de te bercer une nouvelle fois"

Enora était au courant, Braddar passait pour un dépravé...

"Un grand gaillard comme toi, ça va survivre à quatre petites piqûres. Bon allez, donne moi ta main"

Elle lui prit sa main, commença à nettoyer la plaie avec une serviette mouillée d'alcool. Elle frotta doucement avec précaution. Puis elle termina par faire un bandage.

"tout neuf"

Elle regarda Braddar s'éloigner vers le tenancier pour louer une chambre. Lorsqu'il partit, son confrère prit sa place,

"Alors, tu fais ami ami avec le nouveau"
....
"Saches que certains de l'ordre te surveillent"
qui?
"Fais juste attention"

L'homme repartit laissant Enora toute seule avec son verre.

Braddar attendit un petit moment dans le hall. Un silence de cathédrale, il ne vit aucune âme qui vive jusqu'au moment où il entendit le bruit d'un bâton qui claquait sur le carrelage brillant.
Le Père Caboche fit son apparition et demanda à la jeune recrue de le suivre. Ils passèrent le hall, puis ils arrivèrent dans un grand et long couloir et toujours personne. Ils prirent des escaliers pour arriver dans un autre couloir où cette fois-ci Braddar croisa le Prêtre Angelus encapuchonné. Ce dernier lui donna un petit coup d'épaule puis se faufila par une porte. Braddar n'eut le temps de répliquer

"Ne fais pas attention à lui, il n'aime les fortes têtes. Ils aiment qu'on lui obéisse au doigt et à l'oeil"

Ils arrivèrent au bout du couloir et reprirent une nouvelle fois des escaliers en colimaçon. Arrivés en haut, le Père Caboche passa une porte, invita le jeune homme à rentrer dans la pièce.
Braddar se trouvait dans le bureau du vieux ou plutôt dans un vide grenier. Il y avait des babioles de partout, surtout des vieux bouquins.
"Assieds toi, nous allons bavarder un petit moment."

Braddar regarda la pièce attentivement avant de s'asseoir et vit sur le bureau du Père Caboche plusieurs parchemins.
Il se trouvait trop loin pour les déchiffrer mais il remarqua dans le tas une image, elle représentait un jeune garçon à la peau mate.

"Ma protégée m'a dit, tôt ce matin, que tu avais admirablement réussi ton entraînement. Les épreuves avec brio tu as passé. Je vais te dire ce qu'on fait ici. Tu l'as surement deviné mais c'est un camouflage, ce n'est pas vraiment un monastère. Nous voulons placer la race des humains en haut de l'affiche et pour ce faire nous affaiblissons nos ennemis les plus importants. La victoire ne se jouerait pas sur un champ de bataille mais en éliminant les seigneurs un par un sans bruit. Tu comprends?

"Hum hum, un homme doué de raisons. Petit à petit nous sommes arrivés à avoir un bon réseau. Tout homme est utile, leurs yeux et leurs oreilles sont nécessaires pour nous autres. Alors on a prêché la bonne parole pour arriver à nos faims, après sans te mentir nous sommes contraints d'en rincer quelques-uns. L' argent, les filles, je ne suis pas friand mais ça marche. Les hommes se confient plus facilement sur l'oreiller.
Donc comme tu l'as compris, tu devras accepter les contrats. Maintenant tu ne peux plus reculer, tu en sais déjà trop. Tu feras équipe au début avec Enora. Vous avez l' air de vous entendre, tout les deux..."

"Hum Hum, ta question me surprend. Le fait d'être désormais obligé d'accepter les contrats ne te déranges point maintenant? Tu es des nôtres à présent, cela implique des contraintes et une liberté amoindrie.
Face à moi un homme sage je retrouve?