En route vers Halarahh

Hékrak' les laissa dormir. Au petit matin, il profita de l'aube pour lancer sa dague en travers de la gorge d'un lapin qui passait par là. Un peu de viande fraiche agrémenterait la viande séchée qu'ils avaient emportés et améliorerait le petit déjeuner.

"Arf ! Arf ! Arf ! T'es un blagueur toi ! Tu sais k'l'espérance de vie des orcs est sensiblement la même que les zumains, voire même un poil plus kourte ? J'suis plus un p'tit jeune moi non plus ! Ici, y'a guère k'la belle aux bois dormants ki est plus proche de sa jeunesse ke de sa vieillesse !

Ceci dit, l'lapin suffira pas tout seul ! On peut l'agrémenter d'un peu d'barbark' séchée ! Après on pourra repartir trankilou ! "

"Ouais, bien dormi çà va !

Ah ? Nan on fait juste un p'tit déj' amélioré, histoire de prendre le plein d'forces avant de repartir ! Pose une fesse par là ! C'est bientôt prêt ! "

La matinée se passa tranquillement. Mais à la pause de midi, alors que Hékrak était parti chercher du bois pour le feu de camp et que Delgar s'était éloigné de quelques pas pour satisfaire un besoin naturel, Ello entendit un faible gémissement comme ceux que font les gens qui agonisent. Elle ramassa son épée et s'approcha prudemment de la source du bruit.

Au même moment, un sanglier boiteux apparut au détour d'un bosquet devant l'orc. Il broutait paisiblement au pied d'un chêne et ne semblait pas avoir repéré Hékrak. Le guerrier posa en silence son fagot de branches et décrocha sa hache. L'animal huma l'air, comme s'il avait senti quelque chose et se mit à trotter plus loin. L'orc entreprit de le prendre en chasse discrètement, un pareil gibier, çà serait bête de le laisser filer.

Le clapotis d'un ruisseau attira l'oreille de Delgar. Au bout de quelques mètres, il trouva les lacets d'un fin ruisseau dans la forêt. Bon moyen de remplir les outres d'eau fraîche se dit-il. Mais le cours d'eau était calme. Qu'est ce qui avait pu provoquer ce clapotis tout à l'heure ?

Avec trop de retard à l'allumage, une troupe les avait suivis depuis Castellac. Se fiant aux traces laissées, ils finirent par les retrouver le lendemain de leur départ. Les suivant à bonne distance, ils repérèrent leur arrêt pendant midi et passèrent à l'action.

Se répartissant en 2 groupes, des ombres furtives s'approchèrent discrètement autour de Delgar et autour de Ellorelloran.

Par un malheureux hasard des circonstances ... ces malandrins bien humains n'avaient pas choisi le bon jour pour trainer dans le coin ...

Un autre groupe errait dans la zone. Eparpillés pour couvrir plus de distance, plusieurs orcs sauvages (un modèle plus primitif, tout en muscles huilés, en cheveux attachés en queue de cheval ou en nattes grossières, en pagne en peaux de bêtes, piercings divers en os, et scarifications multiples) glanaient gibiers et baies pour faire du stock.

L'un d'eux repéra le même sanglier blessé que Hékrak et finit par apercevoir le grand orc, il s'arrêta en silence. De même, d'autres repérèrent les 2 groupes humains. Isolés les uns des autres ils n'étaient pas en état d'attaquer les humains pour le moment. Ils s'arrêtèrent et des cris d'oiseaux furent discrètement échangés ...

Le gros de la troupe des orcs attendait dans une grotte à quelques kilomètres. Trop peu discrets pour vadrouiller en pleine campagne castellienne sans se faire repérer, une 20aine d'orcs vétérans, leurs gorets de trait, et leurs sacs chargés de pillages, attendaient tranquillement. Ils avaient envoyé les seuls discrets de la bande, les sauvages, pour s'occuper du ravitaillement. Une fois le stock fait pour plusieurs jours, ils reprendraient la route, en pillant ce qu'ils croiseraient en passant. Pour l'heure, c'était l'attente studieuse et sage.

Côté Delgar, il repéra soudain un mouvement devant lui dans un fourré. D'ailleurs, il fallait bien avouer qu'il n'y avait plus de chants d'oiseaux depuis quelques temps. Un autre mouvement bref, loin derrière lui, attira aussi son oreille.

Côté Ello, elle finit par trouver au détour d'une sente envahie de fougères, un corps allongé sur le ventre qui gémissait faiblement. Aucune trace de sac de voyage ni d'arme, peut être un voyageur isolé rançonné. Alors qu'elle s'approchait prudemment, elle remarqua elle aussi l'absence de chants d'oiseaux.

"Hélà ! (*1, 2, 3, 4, 5 .... 7 ! Génial ! Des p'tits gars des bois en plus !*) ... Ouais voilà, Salut aussi ! K'est-s'ke j'peux faire pour vot' services messieurs ? "

L'orc évalua les orcs sauvages. Certains des os qui leurs servaient de piercings n'étaient clairement pas originaires de petits animaux, il y avait de l'os humain et de l'os d'orcs ... Cette phrase n'était pas qu'une figure de style. Mais en même temps, compte tenu du mode de vie de ces cousins là, il ne s'en étonna pas.

"Mouais ... J'pourrais faire du dégât dans vot' joyeuse bande mais pas sûr ke j'm'en sorte ... Et j'suis pas pressé d'finir dans l'estomac des survivants ! Tout çà pour un sanglier amoindri ... C'est pas très rentable ...

Des formes sombres sortirent des fourrés, une demi-douzaine de silhouettes humanoides, encore cachées dans l'ombre des arbres.

Il se tourna lentement et elle reconnut aussitôt le petit connard qu'elle avait croisé il y a peu dans une ruelle de Castellac.

Il n'était pas armé, c'était l'occasion rêvée de lui passer définitivement l'épée à travers le bide. Elle fit un pas lorsque des mouvements sur la gauche et la droite la freinèrent aussitôt, mais ces mouvements n'étaient que des diversions et au dessus d'elle, un complice lâcha un filet plombé ...